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07/09/2024

BILLET : Pluies exceptionnelles au Maroc- Par G. Paranton


 

L'été 2024 a vu des précipitations exceptionnellement élevées dans les provinces sahariennes du Maroc, une région qui fait partie du Sahara, l'un des déserts les plus secs et les plus chauds au monde. Ces précipitations sont même censées durer encore pour cinq mois selon certaines prévisions. Cet événement, rarissime pour une région recevant habituellement très peu de pluie, pourrait être le signe d'une redistribution aléatoire des précipitations attribuable au dérèglement climatique. En s'appuyant sur les données récentes et des observations météorologiques, cette analyse explore les causes, la nature et les conséquences de ce phénomène. Lire plus


En septembre 2024, le désert du Sahara a enregistré des précipitations atteignant jusqu'à 500 % des moyennes mensuelles normales, avec des cumuls dépassant parfois 1 000 % des moyennes locales. Cette quantité de pluie, prévue pour s’étaler sur environ deux semaines, est sans précédent pour une région caractérisée par son aridité. Par comparaison, cet événement pourrait surpasser le dernier épisode pluvieux majeur de 1994, qui était déjà considéré comme historique.

 

Le Sahara s'étend sur plus de 9,2 millions de kilomètres carrés, de l'océan Atlantique à l'ouest à la mer Rouge à l'est. Il est majoritairement sec en raison d'un système de haute pression subtropicale qui empêche la formation de précipitations. Les événements pluvieux importants y sont extrêmement rares, se produisant en moyenne une fois tous les dix ans selon Severe Weather Europe. Si les prévisions de précipitations pour 2024 se concrétisent, cet épisode pourrait devenir le plus important jamais observé depuis le début des relevés météorologiques.

La Direction générale de la météorologie (DGM) du Maroc a attribué cet événement exceptionnel à une montée inhabituelle du Front Intertropical (FIT) vers le nord. Ce système météorologique, l’un des principaux qui influence le climat des zones tropicales et subtropicales, se déplace normalement en fonction des saisons, influençant ainsi la formation des orages et des perturbations atmosphériques.

En septembre 2024, le FIT s’est déplacé bien au-delà de sa position normale pour cette période de l’année, atteignant les provinces sahariennes du Maroc. Ce déplacement vers le nord a coïncidé avec la descente de masses d'air froid en altitude, due à une dépression atmosphérique sur l'extrême nord du Maroc. Cette interaction a exacerbé l'instabilité atmosphérique, générant des averses orageuses et même des chutes de grêle dans des régions comme l'Atlas, le sud-est du Maroc, et le sud de l'Oriental.

Ce déplacement atypique du FIT et la montée de la Zone de Convergence Intertropicale (ZCIT) vers le nord pourraient être des manifestations directes du dérèglement climatique. Les causes exactes de cette perturbation ne sont pas encore bien comprises, mais les changements dans les schémas de circulation atmosphérique dus au réchauffement climatique pourraient en être un facteur clé. Ce phénomène accentue l'occurrence d'événements météorologiques extrêmes et accroît la variabilité des précipitations, affectant des régions habituellement arides comme le Sahara.

Le Sahara n'est pas étranger aux changements climatiques sur le long terme. Il y a quelques milliers d'années, cette région était verdoyante, parsemée de lacs et de rivières, avant de devenir désertique en raison de changements climatiques globaux. L'épisode actuel de 2024 pourrait indiquer une tendance à des fluctuations climatiques encore plus erratiques, suggérant que même des régions hyper-arides peuvent connaître des événements pluvieux majeurs, mais ponctuels.

Les répercussions de cet épisode de fortes précipitations ne se limitent pas au Sahara. Les inondations qui ont frappé récemment le Soudan et le sud de l'Égypte, provoquant l'effondrement d'un barrage et la mort de plus de 130 personnes à Arbaat, démontrent les dangers associés à ces phénomènes climatiques extrêmes. Le déplacement vers le nord de la ZCIT pourrait également avoir des implications pour la saison des ouragans dans l'Atlantique, accentuant encore davantage la variabilité climatique.

Pour les régions sahariennes et subtropicales, ces événements suggèrent une nécessité urgente de revoir les modèles climatiques actuels et d'explorer des stratégies d'adaptation pour gérer les ressources hydriques et protéger les populations locales des impacts de pluies soudaines et intenses. Ce phénomène met en lumière l'importance de renforcer la résilience des infrastructures et d'investir dans la recherche pour mieux anticiper les futurs défis climatiques.

Les précipitations exceptionnelles enregistrées dans le Sahara marocain en 2024 sont un signal d'alerte sur les effets potentiellement désordonnés du dérèglement climatique, bien que cette redistribution aléatoire des pluies soit quand même la bienvenue. Ces événements extrêmes soulignent la nécessité de stratégies globales pour comprendre, anticiper et s'adapter aux nouvelles réalités climatiques.

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